Gary s’est levé tôt ce samedi matin.
Mécanicien, employé par le gouvernement des îles Marshall, il a été envoyé à Wotje pour une série d’interventions techniques sur le matériel et la machine à glace de la compagnie gouvernementale de pêche. Comme il n’y a qu’une liaison aérienne par semaine entre Wotje et Majuro, et que lundi c’est la finale du « Superbowl » de football américain, il ne veut manquer l’avion de retour sous aucun prétexte. Le vol est prévu pour 10h45 et il faut encore que ses amis préparent une pleine glacière de crabes du lagon congelés, à partager lors de la mega- fête qu’il va faire dans un pub de Majuro avec une trentaine de copains tous amateurs de football, et tous supporters du club de Seattle.
A 10 heures nous le retrouvons devant le Wotje Airport Lodge, petit bâtiment en brique qui abrite 3 chambres, mais aussi un bureau, celui de la BOMI (Bank of Marshall Islands) Micro Finance Office ainsi que le MIDS (Marshall Island Developpment Service) Self Housing project. C’est simple, c’est petit, mais c’est bien organisé et cela fonctionne.
Mais peut-on en dire autant d’Air Marshall Island ? « Ici on l’appelle Air Maybe (Air Peut-être !) » nous dit en souriant Gary qui, prudent, n’a pas encore envoyé chercher la glacière de crabes. Mais bonne nouvelle Gary qui a un copain chez Air Marshall, vient de recevoir un SMS qui lui confirme que le vol aura bien lieu aujourd’hui.
11h30 : cela se précise, aux dernières nouvelles l’avion est parti de Majuro et le vol dure 45 minutes. Gary fait venir la glacière. 12h : les crabes sont là, dans la glacière, qui est déposée maintenant en plein soleil sur le « tarmac » en herbe.
12h15 : 4 responsables de la sécurité prennent position de chaque côté de la piste en herbe qui coupe le village en deux, pour empêcher la population de traverser lors de la manœuvre de l’avion. Cette fois-ci ça se précise vraiment…
13h30, alors que le village est toujours coupé en deux, rien à l’horizon… Un SMS de son copain indique à Gary que l’avion est en fait à Kwajalein après une escale à Linkiep, mais qu’il vient de repartir, il devrait être là dans 45 minutes. Les crabes sont toujours en plein soleil.
14h15 : Toujours rien, et pour cause, l’avion est retourné à Majuro. Trop de passagers non prévus et plus de place pour ceux de Wotje. Mais il va repartir de suite dit un nouveau SMS. « Dommage que je n’ai pas mis de sel et de poivre avec mes crabes » dit Gary en riant, comme ça ils auraient été déjà cuits et assaisonnés ! »
15h30 : A peine un vrombissement, et l’avion débouche de derrière les cocotiers et se pose d’un coup, sans même un passage à basse altitude pour prévenir les « assistants » de piste, toujours fidèles au poste depuis plus de 3 heures. Tout le village ou presque accoure, qui pour suivre « l’événement », qui pour récupérer un colis ou du courrier. Les petites soutes du Dornier 29 sont ouvertes, les paquets sont déposés dans l’herbe, une famille récupère un quart de mètre-cube de Pampers commandé à Majuro… et les crabes finalement embarquent avec le reste des bagages.
15h50 : Les hélices tournent, l’avion file en bout de piste, se lance en cahotant sur la piste en herbe et finalement décolle… Mais très vite il tourne, direction le nord… Ce n’est pas la direction de Majuro. Sans doute encore une escale imprévue… Gary n’est toujours pas à Majuro. Mais il y sera à temps tout de même pour la finale du « Superbowl »
P.S: Quant à nous, le vent s’étant un peu calmé, nous repartons demain à l’aube, à la voile en direction de Majuro. Nous devrions y être mardi soir. Restera à attendre le colis, déjà en route avec UPS. Il était ce matin déjà à Philadelphie.