Le pôle magnétique ou l’ivresse du pilote

Un peu à droite… un peu à gauche… Chamade titube ce matin aux confins du détroit de Lancaster et de Barrow. Peu de vent, nous faisons route au moteur, sous pilote automatique qui dispense l’équipier de quart de tenir la barre. Une simple surveillance suffit, plus pour éviter les icebergs ou les bourguignons (petits glaçons) que pour prévenir une collision avec les autres navires, à vrai dire bien peu nombreux dans la région.

Bourré d’électronique, le cerveau de notre pilote commande un petit vérin hydraulique qui tient la barre. Et si ce matin il semble souffrir d’éthylisme prononcé, l’explication est simple. Il digère mal la proximité du pôle nord magnétique. Le cœur de son dispositif, un compas (boussole), ne « sent » plus suffisamment le nord.

Nous sommes maintenant à moins de 600 kilomètres du fameux pôle nord magnétique, situé approximativement par 79°N et 105° W. Un pôle magnétique bien loin du « vrai » pôle nord puisque 1100 kilomètres les séparent. Le pôle magnétique c’est le lieu où se concentrent les lignes de forces du champ magnétique qui entoure la terre. Comme autour d’un aimant, ces lignes longent la surface de la terre et se rejoignent au pôle sud et nord magnétique et plongent dans les entrailles de la terre aux pôles magnétiques, faisant peu à peu basculer le compas. Le voilà donc incapable de s’aligner sur ce champ qui devient vertical. Pour nous cela veut dire que nous allons devoir maintenant tenir la barre en permanence, et cela pour 3 semaines environ, jusqu’à la sortie de l’archipel arctique canadien. Ajoutons toutefois que cet écart entre pôle magnétique et pôle vrai est une constante de la navigation. A chaque calcul de route, il faut corriger le cap mesuré sur la carte (le cap vrai) de la valeur de la « déclinaison » et donc indiquer au barreur le cap compas à suivre (cap magnétique).

Une déclinaison faible en Suisse, puisque vu de Genève, le pôle magnétique se cache derrière le pôle nord, à 2 degrés près. Mais vu de Nuuk au Groenland, l’écart est de 35 degrés vers l’ouest. Ou de presque tout autant vu de l’Océan Indien, mais vers l’est cette fois-ci. A noter aussi que la position du pôle magnétique n’est pas fixe, mais qu’elle se déplace lentement chaque année. Cette « variation » comme la « déclinaison » figurent bien sûr sur les documents nautiques que nous utilisons, et mieux vaut ne pas les oublier si l’on veut arriver à bon port !

1 Commentaire

  1. Christian Répondre

    Bonjour Marc. Il n’y a pas moyen de faire fonctionner le pilote à partir du GPS?
    Amitiés
    Christian

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