« Je suis né le 25 janvier 1941, trop tard pour empêcher Pearl Harbor… ! »
Norimitsu San éclate de rire… avant de reprendre, plus sérieux « … et quelquefois je me sens un peu coupable… »
Rencontré à la marina d’Odo où il possède un voilier de 9 mètres, Nori San nous a réservé un accueil comme les Japonais en ont le secret. Il vient chaque jour avec un sac rempli de provisions, de bières ou de vin.
Mais ce n’est que ce lundi, alors qu’il nous a emmenés dans un restaurant magnifiquement situé sur une colline dominée par un sanctuaire shinto, qu’il se met soudain à nous raconter son histoire.
Il est donc né en 1941 dans la région de Fukuoka. Son père est professeur, mais il est surtout très proche de l’armée et du courant nationaliste qui vient de plonger le Japon dans une aventure militariste catastrophique. Trois ans plus tard, son grand frère s’engage, à 16 ans, dans les forces armées, sans même avertir ses parents. En 1945, radio dans un bombardier, il meurt en kamikaze, dans une mission suicide.
Dans l’épuration qui suit la fin de la guerre son père perd son poste de professeur et la famille survit dans une grande pauvreté. Mais Nori n’en garde aucune rancune, bien au contraire. Il entreprend des études d’ingénieur dans la construction, et passe même une année aux Etats-Unis avant de devenir à son tour professeur dans une université technologique de Fukuoka.
Puis il épouse Hiroko, une jeune Japonaise qui vient de passer deux années… à Bâle, en Suisse, comme infirmière.
Hiroko et Nori à bord, c’est une délicieuse soirée où suisse-allemand (un peu oublié avec le temps), anglais et un peu de japonais (pour Sylvie) se mélangent pour évoquer les souvenirs de la Migros !
C’est surtout un moment rare où nous pouvons échanger librement avec un Japonais qui ne craint pas de donner son opinion, tout en précisant que « ce n’est que mon opinion… je ne suis pas vraiment représentatif de la pensée des Japonais… »
Pour le moins… Mais quel esprit d’ouverture chez cet homme qui non seulement a encouragé l’accueil de centaines d’étudiants chinois dans son université, mais s’est mis récemment à apprendre le coréen. « Pour mieux comprendre ce peuple avec lequel nous avons trop souvent des relations difficiles… »
Nori San et Hiroko San, un couple étonnant, attachant… une rencontre exceptionnelle, une de plus, dans ce voyage japonais décidément incroyable !