Il parque sa voiture en avant (ceux qui connaissent le Japon comprendront!), il adore sa terrasse d’où il jouit de la plus belle vue d’Ishigaki… Rudolf en effet n’est pas Japonais… (quoique !)
C’est Le Suisse d’Ishigaki.
Rudolf, ou comment le rêve d’un gosse de devenir mécanicien de locomotive conduit à vivre sa retraite dans une île tropicale japonaise !
Aucun rapport… pas sûr !
Car Rudolf rêve certes et réalise ses rêves.
Il n’a que 12 ans ( !) quand il prend déjà contact pour réserver une place d’apprenti mécanicien afin d’obtenir le CFC (certificat fédéral de capacité) nécessaire à l’entrée à l’école de conduite des CFF (Chemins de fer suisses).
Mais quand vient le moment, Rudolf veut encore voyager. Il s’enrôle alors comme mousse dans la marine commerciale suisse pour partir à la découverte du monde. Et ainsi tombe amoureux des cargos ! Adieu les locomotives, le voilà qui propose ses services comme mécanicien de bord.
Ayant découvert le Japon, il rêve d’y retourner. Constatant que les constructeurs suisses de moteurs marins ne sont pas bien représentés là-bas, il prend des cours intensifs de japonais et postule chez Sulzer et Cie. Trop contents de trouver un jeune pareillement motivé, ils l’envoient immédiatement superviser des installations en cours.
4 ans à Yokohama puis il se retrouve, toujours pour Sulzer, 13 ans en Corée du Sud, l’un des dragons asiatiques qui développe à pas de géant ses chantiers navals.
En guise d’apothéose, il supervise à Shimonoseki au Japon, la construction de 4 cargos pour l’armateur suisse SCL (Swiss cargo Line) puis de 4 autres en Chine.
Du découpage de la première tôle d’acier jusqu’à la livraison clé en mains : une sacrée responsabilité !
Shimonoseki où il se consacre à ses deux amours : les cargos et Hitomi, sa femme japonaise !
Mais désormais l’heure de la retraite a sonné et ils viennent s’établir à Ishigaki tout au sud du Japon.
« Je n’avais pas envie de passer ma retraite au fond des montagnes suisses ». Alors plutôt que la Floride ou Hawaï, ils sont venus au cœur du Japon tropical. « C’est la bonne taille, assez grand mais pas trop… et ainsi nous restons dans la culture d’Hitomi ». Pas un problème pour Rudolf qui parle fort bien le Japonais.
Finalement, même s’il continue à se parquer en avant, Rudolf est devenu très japonais.
La preuve : ne lui (ou leur) demandez jamais quelque chose « à la légère », car Rudolf et Hitomi n’auront de cesse de trouver le moyen de vous apporter satisfaction. Quand je leur ai demandé où on pourrait, à tout hasard, trouver un drapeau japonais (notre pavillon de courtoisie étant bien malade) Rudolf et Hitomi ont arpenté, en vain, tout Ishigaki.
Qu’à cela ne tienne, le lendemain Hitomi en avait fabriqué elle-même deux ! « Never give up ! » (N’abandonnez jamais !) Un devise bien japonaise que Rudolf a fait sienne !
P.S : Rudolf, nous l’avions rencontré très brièvement en décembre dernier, dans un supermarché, la veille de quitter Ishigaki pour Taïwan. Il avait lu l’article que le journal local nous avait consacré et nous ayant reconnu, nous avait abordés tout timidement. Nous lui avions alors promis de reprendre contact lors de notre retour au Japon. Et c’est ainsi qu’il a immédiatement accepté de jouer les intermédiaires et traducteurs avec les autorités japonaises d’Ishigaki. Un vrai ange gardien bien utile et agréable.