(Par Sylvie)
Ie Shima n’a qu‘une dent. Plantée au milieu de son insulaire platitude.
Une sorte de canine de calcaire que l’on peut escalader. À condition de se taper les 300 marches qui mènent au sommet et de pas s’y laisser emporter par le vent!
Du haut de cette unique dent on peut voir des champs, des plantations et des serres.
Car Ie shima est une paysanne qui cultive essentiellement la canne à sucre, le tabac et les chrysanthèmes qu’on éclaire la nuit pour les empêcher de fleurir trop vite. (Ce n’est pas pour rien qu’elles sont le symbole de la Toussaint, fleurissant avec le retour des nuits d’hiver. Il leur faut plus de 11 heures de nuit pour éclore.)
Mais la paysanne a aussi des goûts monarchiques et son champ de lys blancs donne lieu chaque année à la fin avril, à un festival très prisé des voisins d’Okinawa.
Nous sommes arrivés juste un peu trop tôt, pour assister à la floraison, savamment calculée, de ces délicats liliacées, symbole de pureté (il y a tout de même quelques précoces), qui, à Ie Shima, cohabitent étrangement avec les odeurs de la campagne. Car à quelque centaines de mètres du jardin de lys, se tient deux fois par mois, le marché aux bestiaux.
Etrange spectacle de high-tech et de tradition rurale : les éleveurs-euses, comme Toshiko et ses camarades, vont présenter leur bovin à la pesée, puis la font défiler dans l’enceinte de la bourse.
Les acheteurs font leurs offres anonymement, au moyen d’une télécommande électronique. Le montant de l’enchère s’affiche, avec le poids et le numéro de l’animal.
Et ce n’est qu’à l’adjudication que le numéro de l’acheteur est connu de tous. Puis l’animal passe entre les mains d’un vétérinaire, pour la vaccination.
Il restera encore quelques temps à Ie shima, ou sera envoyé à Okinawa pour produire une viande bien grasse et fondante. Nous avons goûté, c’est excellent.
Ie shima, enfin est une pêcheuse, qui, comme les autres îles de Ryukyu, se défend des typhons et des tsunamis avec des tonnes de béton.
Les bateaux de pêche, comme le port du ferry sont protégés par des digues énormes, les maisons, les toits, les mausolées du cimetière, tout. Ce qui enlève évidemment beaucoup de charme et n’a rien d’esthétique.
Mais bon, il y a autre chose à se mettre sous la dent de Ie Shima.