Un autre Japon

(Par Sylvie)

Bien loin de l’agitation des grandes villes surpeuplées, bien loin de l’image d’un Japon high-tech à la société formatée comme une puce d’ordinateur, bien loin du rêve de l’esthétique absolu, nous découvrons dans les îles de l’ancien royaume de Ruykyu, d’autres facettes du pays.

On y rencontre des sortes de baba-cool qui ont pris de chemins de traverse et ont choisi de vivre à la marge des contraintes sociales. Des gens comme Ryu et Taeko, boat people, la moitié ancrés à Kakeroma ou Hiroaki et Shoko, qui vivent entre l’ile d’Okinoerabu et le toit du monde ( coté indien). Ou encore Tonkatsu, à la tignasse rasta qui fabrique des bougies et se lance dans la culture de patates. Ceux -là ont choisi la décontraction, la campagne et la nature, fuyant le stress et les prix exorbitants des agglomérations.

Aujourd’hui retraités Hiroshi et Sayaka, eux sont venus s’installer dans l’île d’Amami pour la mer qui l’entoure – Hiroshi voulait naviguer sur son voilier – et le zen d’un somptueux paysage au reliefs couverts de végétation tropicale, de rochers et de mangroves.

Hors des entiers battus de la modernité, Sayaka, cultive l’harmonie de la cérémonie du thé qu’elle enseigne dans sa maison, à Atetsu. Une commune de 50 habitants qui en comptait 800 en 1945.
Car si certains retournent à la nature, les campagnes et les îles ne cessent de se dépeupler. Même si l’Etat continue à investir dans de solides infrastructures. Un exode qui se ressent très fort à Koniya (4.000 habitants), deuxième ville de l’île d’Amami. Lorsque nous arrivons dans le petit dock aménagé pour les bateaux de passage, c’est une rangée de spectateurs du 4ème âge qui fait comité d’accueil.

Des adorables ancêtres rigolards, toujours assis sur le même banc, à papoter et commenter l’attraction du jour. Qu’ils s’agisse de l’arrivée de Chamade ou la performance de park golf (Sport entre le golf et le crocket, très prisés des retraités) d’un leur congénère.
Le Japon, c’est bien connu fabrique des centenaires à ne plus que savoir en faire, et visiblement ceux de Koniya paraissent bien plus en forme que leur ville.

Coincée au fond d’une vallée et traversée de petits canaux presque asséchés, Koniya apparaît comme une laide aux eaux dormantes, égarée quelque part, à la fin du miracle japonais.

Des boutiques d’un autre temps, des cubes de béton et des murs gris, derrières lesquels des maisons de faux style ancien, se cognent invariablement le nez.

Et dans le peu d’espace restant : un énorme bric à brac et la lessive qui pend au dessus. C’est ainsi que nous savons que dans les îles les hommes portent toujours des caleçons longs.
Les long des canaux on trouve des échoppes d’un autre temps, qui demeure scandé, à heures fixes par les annonces faites par hauts-parleurs. Comme si internet et Toshiba n’étaient pas arrivés jusqu’à Koniya.

Esthétique japonaise où es-tu ? Ici on fait du solide, pas du beau. Et qui donc viendra réveiller la laide endormie? Peut-être les éleveurs de thon qui petit à petit remplacent les pêcheurs.

Pas belle Koniya, engoncée dans le magnifique écrin de verdure d’Amami ? Qu’importe ! À nos yeux, elle aura eu d’autres atouts puisque nous y avons trouvé du pain, du vrai pain baguette et… les plus délicieux petits sablés ( spécialité d’Okinawa) que le Ciel nous ait donné de goûter.

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